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12 septembre 2010

Burundi : les opposants déçus se rallient au parti au pouvoir

Syfia international 2006/ Audace Nimbona

Au nord du Burundi, les opposants déçus préfèrent aujourd'hui rallier le parti au pouvoir qui les y incite vivement. Les habitants ont aussi compris qu'un adversaire politique n'est pas un ennemi comme les partis le leur faisaient croire.

"Plus question de nous positionner en ennemis du parti au pouvoir, car ça n'en vaut plus la peine. Nous risquons de nous créer des ennuis pour rien !", s'exclame un groupe de fonctionnaires du nord du Burundi, qui avaient milité pour l'opposition lors des élections municipales de mai dernier. Après sa large victoire à ces élections, et aux suivantes, le CNDD-FDD n'a pas eu grand mal à réconcilier les membres des partis politiques qui, avant, se regardaient en chiens de faïence. Ni à recruter de nouveaux militants. "Quel que soit le rythme du tambour, on doit s’y adapter pour danser", dit la tradition. 

Les partis de l'opposition, réunis au sein de l'ADC Ikibiri, (Alliance des Démocrates pour le Changement), ayant renoncé à se présenter aux scrutins présidentiel et législatif, leurs membres ont perdu courage. Certains avaient contracté des dettes pour cotiser pour leur parti politique, d’autres avaient passé du temps à enseigner leurs idéaux aux gens qui risquaient désormais de ne plus leur faire confiance… Récupérer ces déçus est donc facile.

Réconcilier les gens

Selon un membre influent du CNDD-FDD, au gouvernement depuis 2005, "les partis en compétition ne s'entendaient pas pendant la campagne électorale. Mais, après les élections, le parti au pouvoir a le devoir de réconcilier le peuple en faisant tout son possible pour y parvenir." Selon lui, une campagne de sensibilisation et de récupération est en cours sur toutes les collines du territoire national. C'est d'autant plus simple que beaucoup de ceux qui adhèrent à des partis ne le font pas par conviction politique, mais parce que des membres de leur famille ou des amis y sont. Et aussi parce que certains opposants craignent aussi d'être traqués par le pouvoir.
"Moi, je viens d'être invité dans un séminaire à Bujumbura par un membre du parti au pouvoir. C'est possible qu'ils aient un message à me donner", témoigne un fonctionnaire, membre du parti FNL (Front National de Libération). Selon lui, les membres de son parti sont le plus courtisés ces jours-ci par le parti au pouvoir. Selon des rumeurs, en effet, une nouvelle rébellion, pilotée par l'ADC Ikibiri, où le FNL est puissant, serait en train de se préparer.
D'autres s'y résignent aussi pour garder de bonnes relations avec leurs voisins, comme l'avoue un membre du MSD (Mouvement pour la Solidarité et la Démocratie) qui avait été contraint d'accepter des idéaux sans y croire. 

Retour au calme

Pendant la campagne électorale et après les résultats des communales, l'intolérance, la violence, les confrontations étaient fréquentes dans certaines communes des provinces du nord du pays. Actuellement, les gens se sont calmés. "Il était strictement interdit de transporter au dispensaire un malade qui n'est pas de votre parti politique", raconte un membre du MSD de la commune Kiremba, province Ngozi mais "la situation est redevenue normale."

Dans cette commune, dont le chef du FNL, actuellement en exil, est natif, les membres du FNL et ceux du CNDD-FDD ne cessaient alors de s'affronter. Les jeunes du CNDD-FDD, et les Ivyuma vy'indenge (les pièces d'un avion) du FNL, ont causé beaucoup de dégâts matériels et humains.
À Bugabira, province Kirundo, la situation était encore pire. On y empêchait, par exemple, les gens de certains partis d'aller puiser de l'eau à la source. Les grenades lancées par des malfaiteurs, très souvent non identifiés, ont emporté des vies humaines des deux côtés. Aujourd'hui, les gens vaquent normalement à leurs occupations et les intimidations ont cessé. "Les gens font un effort pour comprendre qu'un adversaire politique n'est pas un ennemi, même si pendant la campagne le slogan n’était pas celui-là", rappelle un membre du parti au pouvoir.

Mais, selon J.P. Nkiriza, sociologue, "vouloir réconcilier les gens est une bonne chose, mais y parvenir est une autre chose, car le degré d'instruction de nos populations laisse à désirer et elles sont encore manipulables."


Admin@2010

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