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27 septembre 2014

Burundi:Mariée à un mutwa;l'amour vainc la discrimination

Radio Nederland
Rares sont les batwa qui osent déclarer leur amour envers des filles d'autres composantes ethniques burundaises. Léonard Habimana a su, lui, surmonter les barrières pour dire "je t’aime" à son Odette Akimana, une femme qui a du sang hutu et tutsi. Contre toutes les discriminations, l’amour a triomphé.
Léonard Habimana et Odette Akimana
@Léonce Bitariho/RNW
Léonard Habimana et Odette Akimana se sont rencontrés dans la commune Nyakabiga à Bujumbura, en 2001. Ils étaient encore tous deux sur les bancs de l'école : 
lui à l’université du Burundi, et elle en terminale, au lycée. Nyakabiga,là où habite Libérate Nicayenzi, une parlementaire mutwa .Les étudiants de sa communauté, dont Léonard, se rencontrent souvent chez elle. Libérate, malgré son ethnie souvent discriminée, est amie avec la mère d’Odette depuis leur enfance. Odette est donc également présente lors de ces rencontres.

Léonard la voit et la contemple à chaque occasion qui se présente. Il ne tarde pas à tomber amoureux d’elle. Il commence par lui avouer son admiration en 2002. "Je lui ai déclaré mon amour, mais comme vous le savez, les filles burundaises ne sont pas aussi spontanées à répondre par un oui", confie-t-il. Mais Odette ne dit pas non plus "non", et l’amoureux d’expliquer : "Au fur et à mesure, elle a fini par m’aimer. Je le lisais sur son visage. Je lui ai ainsi donné mon cœur, et elle m’a donné le sien."

"Oui, je suis fiancée avec un mutwa"
Mais tout n’est pas rose dans leur histoire. Chacun a rencontré des problèmes. "Ma famille avait des inquiétudes, raconte Léonard. Ils pensaient que si on fondait un foyer, Odette et moi, notre union n'allait durer que très peu de temps."

Pour Odette, c'était plus compliqué. Elle ne savait pas comment parler de son amour à son entourage. "Je ne le révélais qu’à celui qui me le demandait, en affirmant toujours que oui, je suis fiancée avec un mutwa", raconte-t-elle. Les premiers à être mis au courant de la situation n'avaient qu'une question pour Odette : "Comment ta famille va-t-elle accueillir la nouvelle ?"



Elle médite et persiste dans l’amour envers l’homme de son choix. Léonard l’encourage et la soutient en tout. Tous deux en conviennent : "Ce projet n’appartient qu’à nous. Il n’est ni pour ceux qui lui sont contre, ni pour ceux qui nous comprennent. Notre amour et notre avenir ne concernent que nous."


Les discriminations ne s’arrêtent pas
En 2004, Léonard et Odette fondent leur foyer. C’est au cours de la même année, en novembre, qu’ils accueillent leur premier enfant. Mais les discriminations ne s’arrêtent pas. Si les parents d'Odette n’ont aucun problème à la voir vivre avec un mutwa, certaines personnes de son entourage restent réticentes. Et c’est le père qui en paye les frais. "Dans les familles proches de chez moi, sur la colline natale, papa a été tellement discriminé qu’il ne pouvait pas aller demander quoi que ce soit chez les voisins", se souvient Odette. Il a fallu attendre après le 8 mars 2008, date du mariage du couple, pour que cessent cette discrimination.

Un beau jour, les deux conjoints se rendent dans la famille d'Odette, à Mugamba, dans la province de Bururi, dans le sud du Burundi. "Les proches étaient venus nombreux. Ils étaient curieux de voir un mutwa qui a pu avoir la main de leur fille, se rappelle Odette. À leur grande surprise, ils ont découvert que mon chéri leur ressemblait. Certains ont même avancé que j’avais menti sur son appartenance ethnique."

Aujourd'hui, Léonard et Odette ont trois enfants, deux garçons et une fille : Ricky Tricia Uwera, la première, aura dix ans en novembre ; Don Gad Shama, six ans ; et Don Divin Ebenezer, trois mois. Des enfants qui, au-delà de la discrimination, sont devenus le miroir de leur amour.

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