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19 avril 2011

Pays-Bas : Hutu et Tutsi vivent séparément

RNW.NL/Afrique

C’est le printemps. Les Rwandais commémorent le génocide de 1994, comme chaque année en avril. Cependant, la commémoration aux Pays-Bas s’avère une affaire tutsi. Réconciliation ? "Au Rwanda on avance plus qu’ici !"
Narcisse Gakuba (48) était le cadet de sa famille. Il est le seul à avoir survécu au génocide au Rwanda, qui a fait selon des estimations 800.000 morts. Gakuba est le président d’une association rwandaise pour les survivants du génocide aux Pays-Bas, Ibuka. Nous nous rencontrons cette semaine lors d’un défilé aux flambeaux dans les rues de Rotterdam.
Gakuba n’a pas d’amis hutu. La seule, vraie réconciliation, selon lui, c’est la justice. Aujourd’hui, 17 ans après le génocide, il attend toujours que justice soit faite aux Pays-Bas.
Mal
"On ne peut pas demander aux rescapés de se réconcilier tant qu’il y a des gens aux Pays-Bas, soupçonnés d’avoir participé au génocide, qui ne sont pas poursuivis", dit Gakuba, qui fait allusion à la liste de génocidaires présumés aux Pays-Bas. Jusqu’à aujourd’hui, un seul suspect rwandais, Joseph Mpambara, a été condamné pour torture.
Gakuba : "La réconciliation passe par la repentance, par les génocidaires qui disent : On s’excuse. Alors là, on comprendra. Il y a des gens au Rwanda qui ont demandé pardon. Mais ici, certains ne le reconnaissent pas. Ceux qu’on connait, que les autorités mêmes connaissent, qui ont des dossiers, on attend ! Rien ne se passe ! Ça fait mal."
Séparé
Un peu plus de 1.400 Rwandais vivent aux Pays-Bas, selon l’Office national des statistiques néerlandais CBS en 2009. Les Hutu et les Tutsi, d’après Gakuba, ne se mêlent à peine les uns aux autres.
"Au Rwanda on avance plus qu’ici !, poursuit Gakubal. Aux Pays-Bas, on est toujours Tutsi. On vit séparés. Mais au Rwanda c’est différent. Le matin, le premier à saluer, c’est ton voisin hutu. C’est plus facile."
"De plus, ajoute Gakuba, au Rwanda il y a des gens illettrés, des gens plutôt ignorants. Mais ici, ce sont des planificateurs. Il y a des personnes aux Pays-Bas qui ont été au pouvoir. Ces gens-là s’accrochent à leurs idées."
Ingabire
Autre dossier sensible dans la communauté tutsi aux Pays-Bas : le cas de la politicienne Victoire Ingabire leader du FDU, un parti politque qu’on dit dominé par les hutu. Elle a aussi vécu dans le pays après le génocide. La justice rwandaise l’a emprisonnée à Kigali, la capitale. Elle est accusée par les autorités rwandaises de collaboration avec une organisation terroriste, de diviser le peuple rwandais et de nier le génocide de 1994.
Emerance, une jeune femme tutsi de 26 ans, a voulu rencontrer Ingabire, mais elle n’en a pas eu l’occasion. En 1994, ses parents ont été tués au Rwanda. A l’époque, elle est venue aux Pays-Bas, toute seule.
"J’ai demandé si on pouvait parler, puisqu’Ingabire parlait de pardon, de réconciliation", affirme Emerance. "Je lui ai demandé : Quelles sont vos idées là-dessus ? De quelle façon pouvons-nous agir ?"
"Ingabire m’a envoyé un courriel me disant qu’elle était trop occupée. Elle n’a pas eu le temps de me parler. Alors, je me demande : Si vous parlez de réconciliation, il faut commencer chez vous, aux Pays-Bas, et non pas au Rwanda. Elle a vécu aux Pays-Bas pendant plus de 15 ans. Qu’a-t-elle fait pour la communauté rwandaise ?" Doutes
Victoire Ingabire est partie en janvier 2010 au Rwanda pour se présenter à la présidentielle. Quelques mois plus tard, elle a été accusée et mise en prison. Emerence : "J’ai des doutes sur elle. Mais c’est le juge qui décidera."
Quant à Narcisse Gakuba, le cas de Victoire Ingabire n’est qu’un petit problème. "Si je vous dis que j’ai perdu toute ma famille et maintenant il y a quelqu’un en prison... Moi j’aurais aimé qu’un de mes frères soit en prison et qu’après quelques années il soit libéré ! Donc ce n’est pas un problème !"
Ngenzirabona

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