InfoSud/Syfia
Depuis plus de 2 mois, les activités économiques du Burundi sont paralysées par les élections qui se succèdent. A Bujumbura, la capitale, les clients, souvent ruinés par les cotisations obligatoires aux partis politiques, ne fréquentent plus les commerces qui périclitent. Les services administratifs sont désertés. Seule compte la politique…
Tous les matins de ce mois de juillet, devant le kiosque central situé en plein cœur de Bujumbura, la capitale burundaise, se rassemblent des centaines de personnes qui ont, pour la plupart, déserté le service ou fermé leurs stands au marché. C’est pour "faire le point" sur les élections, disent-ils, s’agglutinant parfois autour d’un poste de radio pour écouter les informations diffusées par les radios locales.
Après les élections communales du 24 mai vigoureusement contestées par les partis d’opposition, viennent de se tenir les élections présidentielles dont le seul candidat était Pierre Nkurunziza, le président sortant, et, le 23 juillet, auront lieu les élections législatives. D’autres scrutins suivront en août.
Résultat : depuis plus de 2 mois, la politique a pris le pas sur l’économie du pays qui tourne au ralenti.
Même les fonctionnaires désertent leurs postes à la mairie de Bujumbura pour rejoindre les chômeurs qui grouillent tous les jours autour du kiosque central. « Je n’ai pas peur de quitter le service, car même mon directeur est allé battre campagne à l’intérieur du pays », déclare un fonctionnaire rencontré sur les lieux.
Les avant-midi, l’essentiel des bureaux au Premium House et au Building de l’éducation, qui abritent le gros des services publics, sont fermés. Seuls les plantons et quelques agents sont présents. « Je passais juste pour une urgence de service », explique un directeur rencontré au Building de l’éducation, pressé de rejoindre d’autres membres de son parti et d’aller battre campagne à l’intérieur du pays.
Pas de clients pour les commerces
L’attention de tous, homme politiques ou non, est focalisée sur les élections. Les violences qui ont suivi les élections communales inquiètent tout le monde, particulièrement les attentats à la grenade qui ont eu lieu un peu partout dans le pays. Le manque à gagner est énorme pour certains opérateurs économiques. Bernard Minani, boutiquier du centre-ville de Bujumbura, a vu son chiffre d’affaires réduit de moitié. « C’est toujours comme ça en période électorale. Les acheteurs ne viennent plus, car ils n’ont pas d’argent. Ils sont obligés de cotiser dans leurs partis respectifs, alors qu’ils ne travaillent presque plus », regrette-t-il en espérant que la situation changera en septembre prochain, avec la fin des élections.
Quant à Alexis Nkunzimana, vendeur de produits alimentaires dans la commune urbaine de Bwiza, il a vu le nombre de ses clients passer de 30 à 12 en moyenne par jour. Chantal Kanyange, vendeuse d’habits au marché central de Bujumbura, passe elle une semaine entière sans recevoir un seul client. « Avant les élections, j’arrivais à gagner 400 000 Francs burundais (346 Francs suisses) par jour, explique-t-elle. Aujourd’hui, je ferais mieux de rester à la maison pour m’occuper des mes enfants, car je ne gagne rien. »
Les cotisations au parti insupportables
Les consommateurs sont inquiets pour l’avenir et ils n’ont plus d’argent. Dans les quartiers, nombreux sont les ménages qui ont remplacé le pain du matin par la banane moins chère et qui achètent le sucre à la cuillère, ne pouvant trouver les 2 000 Francs burundais (1,76 Francs suisses) que coûte le kilo de sucre.
Les leaders politiques n’ont, en effet, aucune pitié pour les militants qui doivent cotiser toujours plus. « Mes enfants risquent de mourir de faim, se plaint un militant du CNDD-FDD au pouvoir. Depuis le début des élections, j’ai déjà versé au parti la totalité de mon salaire net en plus des cotisations ponctuelles, à l’occasion des meetings. Si mon épouse le savait, elle pourrait même réclamer le divorce. »
Les entreprises paraétatiques, qui ont le plus cotisé pour le parti au pouvoir, ont de sérieux problèmes de trésorerie. C’est le cas de la SOSUMO (Société sucrière du Moso) qui a du mal à payer son personnel alors qu’hier elle avait près de 7 milliards de Francs burundais (6 millions de Francs suisses) sur ses comptes, selon un syndicaliste de cette société de production de sucre. Même les SOGESTAL (Société de gestion des stations de lavage du café) ne sont pas épargnées, d’après un cadre de l’Inspection générale de l’Etat.
Mais cette situation importe peu aux politiciens. « La priorité pour nous est d’avoir les voix, le reste viendra après », résume l’un d’eux.
Admin@2010
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