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11 janvier 2010

Les casernes aux militaires, non à leurs familles !


 Au Burundi, le commandement de l'armée fait de la place dans les casernes pour y faire rentrer les soldats encore nombreux dans les collines et consolider ainsi la paix. Mais les familles des militaires tués pendant la guerre civile de 1993 ou encore en activité, qui doivent se reloger ailleurs, demandent plus de moyens.

Huit sous-officiers de l’armée burundaise ont mal vécu l'arrivée de la nouvelle année. Fin 2009, ils ont été rendus à la vie civile. Le haut commandement les accuse d’avoir créé des tensions au sein de l'armée. Durant tout le mois de décembre, ils auraient diffusé des tracts dénonçant l'obligation faite aux familles d’anciens soldats et sous-officiers tués pendant la guerre civile de 1993 de quitter les casernes. Si le départ des 950 familles (chiffres avancés par les veuves) reste effectif, celui des femmes et des enfants des militaires encore en activité, lui aussi prévu, a cependant été repoussé pour éviter que le mécontentement s'amplifie. Mais la fermeté reste de mise. D’après le porte-parole de la Force de défense nationale et des anciens combattants, le général major Lazare Nduwayo, "vivre dans les camps n'est pas un droit pour les familles, mais une exception. Les militaires qui fondent en ce moment leur foyer doivent louer des maisons hors des casernes". Ces dernières seront réservées aux nombreux soldats – aucun chiffre n’est donné – qui sont encore dans les collines pour assurer la sécurité des civils.

"Séparer les armes des populations"

Mais la mesure passe mal et des veuves refusent obstinément de bouger. Sortis de force des casernes en octobre, femmes et enfants s'entassent toujours dans deux tentes installées non loin des bâtiments de la Défense contre avions (DCA), dans la capitale burundaise, Bujumbura. Ils restent jalousement dans ces logis de fortune visiblement décidés à "lutter pour la dignité" de leurs époux et pères, tués au champ d'honneur pendant la guerre civile.

Le commandement de l'armée, qui avait pris le temps d'expliquer le bien-fondé de la mesure, mais n'a pas été compris, a été contraint de déloger ces femmes, belliqueuses pour certaines. "On ne connaît pas les origines de nos anciens maris autres que ces casernes", explique une secrétaire de direction.

L'armée qui a réhabilité la plupart de ces bâtiments avec l'aide du Programme des Nations unies pour la consolidation de la paix reste malgré tout confrontée à l’exiguïté des lieux. Elle ne peut souscrire aux exigences ni des veuves, ni des autres catégories. "Séparer les armes des populations", est, selon le général major Nduwayo, un engagement pris envers la communauté internationale en vue du retour d’une paix définitive.


Un programme largement salué par les habitants des zones hier très perturbées par l'insécurité. "Ce serait une bonne chose que les soldats retournent dans les casernes, car tous les prétextes sont bons pour mettre la population au supplice : retard du ravitaillement, non-participation à des réunions. L'encadrement y est plus serré que dans les collines où c'est la loi de la jungle", se réjouit un enseignant de Bujumbura rural. Certains sont déjà rentrés dans les casernes, mais les effectifs de l'armée sont importants depuis la guerre, selon le porte-parole de l’armée : le gros des troupes, formées d’anciens rebelles et d’anciens combattants réintégrés, est à réinstaller.
Plus de moyens de réinstallation

Quitter les casernes est un principe qui n'est plus guère contesté, mais les réclamations portent à présent sur les compensations nécessaires à cette nouvelle vie. "Nous ne refusons pas de déménager nos familles. Il faut seulement qu'on nous donne les moyens suffisants pour nous installer ailleurs", affirme l'une des veuves. Les 600 000Fbu (600 $) versés en juin 2008 pour quitter les camps sont jugés trop modiques. Des leaders de partis politiques plaident pour de meilleures conditions de réinstallation, une demande considérée comme électoraliste par le commandement.

Les hommes de troupe et les sous-officiers qui refusent de s’exprimer lors des causeries morales organisées par le Haut commandement de l’armée de peur d’être la cible des représailles, confient qu’ils ne sont pas opposés au déménagement de leurs familles, mais demandent des indemnités en rapport avec le coût de la vie hors des camps. Le montant de ces dernières, qui va de 8 000 à 25 000 Fbu (8 à 25 $), devrait, selon eux, être sensiblement revu à la hausse.

Une solution paraît difficile à trouver dans l'immédiat. Selon le général major Lazare Nduwayo, mettre à la disposition des sous-officiers et hommes de troupe des parcelles pour construire pourrait être une bonne solution.
 
(Syfia Grands Lacs/Burundi)
 
 Admin@2010

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